[SON] Bonjour. Bienvenue dans ce cours Aléatoire, qui est en fait une introduction à la théorie des probabilités. Ce cours va être divisé en chapitres qui eux-mêmes seront divisés en séances, et donc vous pourrez vous retrouver facilement dans l'organisation du cours, puisque vous aurez à chaque fois le nom Aléatoire, le numéro du cours et le numéro de la séance. Donc, outre le cours qui va avoir une succession mathématique logique, vous aurez également des, quelques petites séances de prérequis mathématiques qui pourront vous être utiles, des séances d'exercices corrigés et également des questionnaires à choix multiples, pour vous assurer que vous avez bien compris les notions élémentaires. Donc, en fait, dans cette première séance du cours 1, le cours 1 qui va être consacré au modèle probabiliste, je vais vous présenter un peu une introduction de ce que sont les probabilités, puisque c'est peut-être une notion que vous n'avez jamais rencontrée. Donc, qu'est-ce que la théorie de probabilité? Eh bien, c'est une théorie mathématique pour quantifier le hasard. Donc, quantifier le hasard, et je vous ai mis une jolie phrase d'un texte d'un jeune auteur Hervé Le Tellier donc, si on ouvre le dictionnaire au hasard, et qu'on tombe sur le mot hasard, c'est un miracle, et si on tombe sur le mot miracle, c'est un hasard. Et tout cela pour dire que quantifier le hasard, on peut dire que cela tient du miracle. Et c'est sans doute pour cette raison que la notion de, enfin, mathématiques, les notions mathématiques pour quantifier le hasard ont mis tant de temps à émerger. Le hasard a quelque chose à voir avec le divin, et quantifier le hasard, cela voulait dire d'une certaine manière affronter le divin. Donc, on a peu de textes anciens sur cette théorie des probabilités qui a mis très longtemps à émerger. Le mot hasard vient du mot az-zahr, le dé certainement, donc c'est très vraisemblablement un mot d'origine arabe. Et, dans des textes très anciens, on peut trouver des traces d'une science des jeux de dés, dans le Mahabharata, qui est un texte indien célèbre du 4ème siècle, et dans ce texte, outre cette science des dés, qui apparaît à travers le pouvoir d'un Dieu, donc là encore le divin apparaît dans cette science du jeu de dés. Cette science du jeu de dés est associée à des évaluations de nombres de feuilles sur des arbres, donc des évaluations de type sondages, et c'est absolument extraordinaire que dans ce livre si ancien on ait pu trouver cette association entre probabilités et statistiques. Alors après, je fais un grand saut dans l'histoire de la théorie puisqu'en fait on n'a pas de traces essentiellement de développement des probabilités, et il faut attendre en fait la frénésie des jeux qui s'empare de l'Europe au XVIe et XVIIe siècle pour voir vraiment une théorie des probabilités se mettre en place peu à peu. Donc, au XVIe siècle, certains grands scientifiques, en particulier très connus pour leurs travaux en astronomie tels Cardan, Kepler et Galilée, commencent à s'intéresser à une théorie du jeu de dés. Donc, au début c'est vraiment ces jeux de hasard qui motivent les scientifiques. Mais en fait, il faut attendre le XVIIe siècle et Pascal pour que cette théorie prenne vraiment ses lettres de noblesse. Et Pascal était motivé certes par ces jeux de hasard qui obsédaient l'Europe entière, mais également par d'autres problématiques peut-être plus sérieuses, comme les controverses juridiques, et il y a une grande correspondance entre Fermat et Pascal à ce sujet. Fermat est juriste à Toulouse, et se pose des questions sur la probabilité de se tromper quand on juge quelqu'un. Du reste, cette correspondance fait assez froid dans le dos. Donc, Pascal développe une théorie, donc cela est en France, mais il y a également d'autres impulsions qui sont motivées beaucoup dans les pays anglo-saxons par des problèmes d'assurance, donc problématique assez moderne. Et, on voit certains travaux donc, qui essayent de lier des calculs de rentes viagères à des tables de mortalité. C'est assez amusant de voir qu'à l'heure actuelle, les compagnies d'assurance se posent le même type de problèmes, à savoir lier des taux d'assurances à certaines structures par âge de la population par exemple. Alors, au 17ème siècle, on assiste aussi au développement des statistiques. Dans le mot statistique, il y a le mot état, et en fait les États, les gouvernements se rendent compte que, grâce à ces statistiques en fait, ils vont avoir un outil puissant pour prendre des décisions ou pour les imposer. Alors, en fait les probabilités, comme vous le voyez, se développent à partir de problématiques très humaines, des problèmes concrets. Mais en fait, au XIXe siècle se développent des techniques d'analyse, qui vont faire en fait que les probabilités vont se développer d'un point de vue beaucoup plus mathématique. Et, grâce essentiellement à deux apports d'analyse, premièrement le calcul intégral et différentiel, développé en particulier par Laplace et Gauss, et deuxièmement, la théorie de la mesure développée par Borel et Lebesgue. Donc, nous allons utiliser pas mal d'arguments de calcul intégral dans ce cours, et on ne va pas utiliser de théorie de la mesure, au sens où quand on en aura besoin, on construira nous-mêmes les objets dans le contexte qui nous intéresse. Donc, XIXe siècle et début du XXe, les probabilités se développent grâce à ces outils d'analyse. Ensuite, à partir du XXe siècle, il y a un vrai saut de difficulté qui se met en place, puisque jusqu'au début du XXe siècle, en fait on essaye de quantifier et de créer une théorie du hasard, pour des expériences aléatoires, j'ai envie de dire figées. Mais à partir du XXe siècle, on s'intéresse à regarder des phénomènes aléatoires qui évoluent au cours du temps. Donc, on va construire des nouveaux objets probabilistes, qui ont certaines propriétés, donc dans leur dynamique en fonction du temps, et en particulier ce qu'on appelle des processus de Markov. Et on aura trois grands types de développement. Un premier développement en physique statistique, lié à toute, tout le travail en particulier de Einstein et sa création du mouvement brownien. On aura des problèmes qui sont issus des problèmes de démographie, grâce à ce qu'on appelle la classe des processus de branchement, en particulier un processus qui s'appelle le processus de Poisson. Et, on aura aussi le développement d'une théorie statistique et de la biométrie. Donc, trois domaines qui vont se développer tout le courant du XXe siècle. Alors, il faut bien comprendre en fait que cette théorie des probabilités, comme je vous ai dit, elle a mis longtemps à émerger. Mais en fait, elle est extrêmement récente, puisque le modèle probabiliste tel qu'on va le présenter dans ce cours en fait, a été introduit par Kolmogorov en 1933, donc c'est assez récent. Et, le calcul, ce qu'on appelle le calcul stochastique, qui est le calcul intégral lié à ce mouvement brownien, dont je vous ai parlé tout à l'heure, et qui n'est pas l'objectif, enfin l'objet du cours ici, ce calcul stochastique en fait a été introduit en fait par Itô, après la Deuxième Guerre mondiale, donc à partir d'environ 1945. Donc, c'est lui qui est en fait à la base de toute l'approche moderne des probabilités. Donc, en fait vous voyez que le grand essor des probabilités modernes n'intervient qu'à la deuxième moitié du XXe siècle. Et, les outils en fait théoriques se développent jusque dans les années, fin des années 90, disons. Donc, depuis que ces outils ont été construits, en fait il y a un très grand développement des théories probabilistes, à la fois dans des domaines mathématiques, et des domaines d'application extrêmement variés. Donc, je vais vous en citer quelques uns. Par exemple, on a beaucoup de modélisation probabiliste en physique, à travers la physique quantique, la physique des particules. On utilise énormément d'outils probabilistes dans l'informatique et dans tout ce qui est réseaux de télécommunications, réseaux Internet, en traitement du signal et de la parole. Bon, depuis assez récemment on a beaucoup de développement utilisant des modèles probabilistes en biologie, en écologie, en médecine, et en imagerie médicale. Quand vous avez de la reconstruction d'image, scanner, etc, il y a beaucoup de probabilité derrière. En économie, en finance, vous avez tous je pense entendu parler des mathématiques financières qui ont été développées dans les dix dernières années. En assurance, comme je vous l'ai dit, et même en sociologie, donc a beaucoup de modèles probabilistes. Donc, comme vous le voyez, ces probabilités sont en lien très étroit avec la vie quotidienne. Et, les domaines que je vous ai présenté juste avant sont extrêmement variés. Donc, en fait vous allez rencontrer des situations innombrables où le hasard intervient et qui sont de natures extrêmement différentes. Donc, pour essayer de construire une théorie mathématique qui prend en compte toutes ces situations possibles, eh bien, il va falloir se donner un cadre très abstrait qui va pouvoir englober tous ces modèles. Donc, c'est pour cela aussi que ce modèle probabiliste a mis du temps. Je vous ai dit, Kolmogorov c'est 1933, donc ce modèle probabiliste a mis du temps à émerger, parce qu'il était nécessairement très abstrait, et donc les mathématiques sous-jacentes étaient, sont quand même des mathématiques difficiles. Donc cela, ce modèle probabiliste, la construction de ce modèle va être l'objet essentiellement du cours 1. Et ensuite, on va voir des tas de développements à partir de ce modèle. Alors, cela c'est le point de vue, disons abstraction mathématique du modèle probabiliste. Un deuxième point que je voudrais souligner, c'est que les probabilités sont beaucoup utilisées à des fins numériques, à travers ce qu'on appelle les méthodes de Monte-Carlo, dont on parlera dans les derniers cours, et qui sont des méthodes d'expérimentation numérique basées sur la modélisation probabiliste. Ces méthodes sont efficaces quand on étudie les problèmes en grande dimension. Je vous ai donné quelques exemples en météorologie, dans l'aérospatial, dans les mathématiques financières, et elles sont très efficaces, parce qu'elles sont extrêmement rapides. Par exemple, dans les salles de marchés, on a besoin d'avoir la simulation quasiment en temps réel, et on utilise les méthodes de Monte-Carlo, donc des méthodes basées sur des outils probabilistes, plutôt que des méthodes d'expérimentation numérique déterministe. Et, elle permettent également de simuler des phénomènes extrêmement irréguliers. Donc, ce que je voudrais vraiment vous dire, c'est que le but de ce cours, c'est de vous donner une approche élémentaire mais rigoureuse de la théorie probabiliste. On essaiera d'être le plus rigoureux possible et je voudrais aussi vous illustrer les résultats qu'on obtiendra, par un certain nombre de simulations. Simulations qui vont être interactives, vous allez pouvoir jouer avec ces simulations pour essayer de comprendre ce que c'est vraiment un phénomène aléatoire. Et je voudrais vraiment qu'à travers ce cours, et à travers la découverte des probabilités, nous puissions vous transmettre un peu l'idée de la démarche d'un mathématicien appliqué, qui se trouve face à un problème concret, et qui doit donner des réponses quantitatives ou phénoménologiques à partir de ce modèle concret. La démarche du mathématicien appliqué, eh bien c'est quoi? Eh bien, c'est premièrement, transformer le problème concret en un problème mathématique, ce qu'on appelle une mise en équation du problème. Deuxièmement, essayer de résoudre ou résoudre au moins en partie le problème théorique lié au modèle mathématique. Et troisièmement, essayer de développer une expérimentation numérique qui va permettre de visualiser en fait le modèle théorique, ou de quantifier, de répondre à des questions quantitatives sur le problème concret. Donc, cette expérimentation numérique va pouvoir aider à faire des calculs, ou donner des valeurs approchées, en tous cas, de certaines quantités que le mathématicien appliqué souhaite calculer. Donc, démarche de mathématiques appliquées, modélisation, résolution théorique et expérimentation numérique.